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Vocabulaire de la botanique (5): fleurs irrégulières

Date 20/10/2017
Ico Initiation à la botanique joyeuse!

Bouquet de fleurs sauvages zygomorphes du Poitou!

Bouquet de fleurs sauvages zygomorphes du Poitou!

(Dans l'ordre: Lamier jaune, Vesce cultivée, Aristoloche clématite, Orchis bouc, Orobanche, Orchis vert, Violette odorante, Lamier pourpre et Euphraise raide)


Après l'article consacré aux fleurs régulières (les fleurs en tout point symétriques par rapport à leur centre, de forme «classique» et circulaire en somme), il est temps de se pencher vers des spécimens d'apparence plus excentrique: les fleurs irrégulières (ou «zygomorphes») qui apportent avec leurs silhouettes alambiquées un cortège de nouveaux mots. On peut dégager quelques clans de Sauvages emblématiques (mais pas exclusifs) au sein de ce courant botanico-artistique.

On dirait un Picasso période déstructurée!

(Sacré Robin des Bois, Mel Brooks)

Les fleurs irrégulières, Sauvages du Poitou!




La famille Fabaceae (où se côtoient des célébrités telles que les Fèves, Pois, Haricots, Trèfles, Luzernes, Vesces, Gesses...) est une des plus riches en matière de fleurs irrégulières. Et plus particulièrement ses membres qualifiés de «Papilionacés»: c'est dans les filets des amateurs de papillons, mais surtout au fond des cales des voiliers de plaisance (Hisse et ho!) qu'on va attraper les mots nous permettant de décrire leur cinq pétales.


La fleur papilionacée, Sauvages du Poitou

Étendard : le pétale supérieur, généralement le plus large.

Ailes : les deux pétales latéraux.

Carène : ensemble des deux pétales inférieurs.

Cytisus scoparius, Genêt à balais, Biard (86)


Les fleurs jaunes vif d'un Genêt à balais (Cytisus scoparius) s’avèrent très pédagogique: on observe sans peine l’étendard au-dessus, de même que les deux ailes disposées de chaque côté de la carène (la carène est en fait composée de deux pétales soudés entre eux).


Leptidea sinapis sur Lotus corniculatus, Biard (86)


L’Argus bleu (Polyommatus icarus) face au Lotier corniculé (Lotus corniculatus): un papillon et une Papillonacée, deux amis forcément inséparables! Le large étendard du Lotier corniculé, bombé vers l’avant comme s’il avait le vent dans le dos, surplombe les deux ailes. Les ailes recouvrent et cachent une carène fortement coudée, comme une petite corne. C’est peut-être de là que la sauvage tire son nom, corniculatus étant la corne en latin.



T’es mal placé dans la chaîne alimentaire pour faire ta grande gueule!

(L’âge de glace, Chris Wedge et Carlos Saldanha)

Du côté des Lamiaceae (anciennement «Labiées»), représentées par les Menthes, Mélisses, Thyms, Romarins, ou Origans, on puise l'inspiration dans la mythologie grecque: la jeune et séduisante Lamia était l'amante de Zeus. Un jour, la femme du Dieu, Héra la jalouse, tua leur enfant illégitime. Lamia, inconsolable, décida qu'aucune mère n'avait le droit d'être heureuse, et se transforma en un monstre qui mangeait les enfants des autres! Ainsi, les fleurs des Lamiaceae qui évoquent une gueule ouverte doivent leur nom à la terrible ogresse... Leurs pétales deviennent tout naturellement des «lèvres».


Lamiaceae...? Sauvages du Poitou!


Les lèvres se présentent toujours deux par deux: une supérieure et une inférieure (quoi de plus normal pour une bouche). Quant à l'entrée du tube formé par la corolle, elle est désignée comme étant... «La gorge»!


Rosmarinus officinalis, Romarin officinal, Poitiers Chilvert


Fleurs du Romarin officinal (Rosmarinus officinalis): la lèvre supérieure de la corolle forme une sorte de «casque» fendu (on appelle «casque» un sépale ou un pétale supérieur recourbé vers l'avant). La lèvre inférieure possède trois lobes, le central plus large et concave: c'est la «piste d'atterrissage» pour les butineurs.


Melittis melissophyllum, Mélitte à feuilles de mélisse, Poitiers bords de Boivre


Fleurs de la Mélitte à feuilles de mélisse (Melittis melissophyllum): Les grandes corolles blanche ou roses de la Mélitte à feuilles de mélisse — une forestière qui fleurit entre mai et juillet — sont composées d’un tube très saillant, à gorge très élargie. La lèvre supérieure, un peu concave, est entière. La lèvre inférieure se découpe en trois lobes étalés : deux lobes latéraux et un grand lobe médian plus foncé, comme une grosse langue pendante. Bien souvent, c’est la première chose qui nous frappe lorsqu’on rencontre une Lamiacée en fleur : elle nous tire la langue !


Les fleurs zygomorphes des Lamiacées cachent parfois des mécanismes complexes, destinés à favoriser leur reproduction. Ainsi, les butineurs qui s'engouffrent dans les corolles de la Sauge des prés (Salvia pratensis) s'opposent à des «barreaux» qui barrent l'accès au nectar. En forçant le passage, le butineur enclenche une mécanique de contrepoids qui fait pivoter des étamines vers le bas, jusqu'à ce que leur anthère touche le dos de l'insecte pour y déposer le pollen.

Salvia pratensis, Sauvages du Poitou!

Les épaules ainsi saupoudrées, le butineur s'envole vers d'autres fleurs où son dos caressera la «langue de serpent» qui surplombe la fleur, en fait le style recourbé d'un pistil à maturité... Ingénieuse nature!


Salvia pratensis, Sauge des prés, Chezeau (86)

Sauge des prés et butineur, Chezeau (86)



Je suis un artiste et mon œuvre c’est moi.

(Hell, Bruno Chiche)

Les Orchidées (Orchidaceae) constituent une grande famille éclectique et c'est probablement en son sein qu'on trouve les artistes les plus perchés! Si le vocabulaire qui permet d'observer leurs chefs d’œuvres devient un poil plus hermétique, le piège réside surtout dans la ressemblance entre pétales et sépales (certains auteurs préfèrent même parler de six tépales), tous richement colorés. Disons qu'une fleur d'Orchidée présente généralement une structure à trois sépales (une première couronne extérieure) et trois pétales (une seconde couronne intérieure), disposés autour d'une pièce centrale nommée «colonne» qui regroupe les organes sexuels de la plante. Plongeons du côté obscur de la botanique:


Fleur de l'orchidée, Sauvages du Poitou!


Le sépale dorsal et les deux pétales latéraux convergent souvent pour former un «casque» protecteur au-dessus de la colonne. L'élément le plus spectaculaire est le pétale inférieur qui sert d'appât et de piste atterrissage pour les butineurs: on nomme celui-ci «labelle». Ce dernier est parfois prolongé d'un éperon vers l'arrière.


Anacamptis morio, Orchis bouffon, Biard Petit Mazay (86)


Fleurs l'Orchis bouffon (Anacamptis morio): les trois sépales et les deux pétales latéraux, nettement striés, forment un «casque» qui protège la colonne. Le labelle, plus large que long, est maculé en son centre, divisé en trois lobes (les lobes latéraux sont crénelés) et prolongé à l’arrière par un éperon. C'est généralement une offrande de nectar qui permet aux sauvages d'attirer les butineurs dans leurs fleurs; l’éperon peut en constituer la réserve. Mais chez la plupart des Orchidées, l’éperon n’est qu’un leurre dénué de récompense. Ainsi, notre Orchis bouffon n’a rien d’autre à offrir à ses visiteurs que de belles promesses dans un emballage trompeur.


Les Orchidées usent de nombreux subterfuges de ce genre pour attirer les pollinisateurs. Chez les Ophrys par exemple, le labelle s'est transformé au fil de l'évolution en une imitation de la seule chose qui compte plus qu'un festin aux yeux d'un insecte: un partenaire pour la reproduction. 


Ophrys apifera, Ophrys abeille, Biard (86)


Ainsi chez l’Ophrys abeille (Ophrys apifera), les trois sépales très étalés sont généralement roses. Les deux pétales latéraux sont très courts, disposés au-dessus du labelle. Ce dernier est trilobé, brun-rouge, dépourvu d’éperon, flanqué d’un motif coloré (nommé la «macule») digne d’un tatouage de chef indien. De loin, le labelle évoque le corps d’une abeille. C’est en tout cas ce que pensent les mâles de plusieurs espèces d’abeilles solitaires qui reconnaissent l'abdomen de leur femelle (les phéromones sexuelles dégagées par la fleur parachèvent l'illusion) sur lequel ils se précipitent et se frottent, assurant la pollinisation. Autre appât: deux petits nectaires luisants sont situés de part et d’autre de la base du labelle. On les surnomme les pseudo-yeux.

Les Orchidées étonnent, fascinent, et le vocabulaire sophistiqué qui leur est associé ne saurait être présenté ici de manière exhaustive.




Je vous invite à nous retrouver dans un prochain article, où il sera question des inflorescences particulières en grappes, en ombelles, en corymbes ou encore en capitules (pour ne citer que les plus célèbres), et du vocabulaire spécifique aux Poaceae (ou Graminées), des Sauvages aux fleurs très discrètes. To be continued...


D'autres leçons de botanique consacrées aux fleurs sur Sauvages du Poitou:

- Le vocabulaire de la botanique (4): les fleurs régulières
- Le vocabulaire de la botanique (6): inflorescences et capitules
- Le vocabulaire de la botanique (7): Poacées, herbes, céréales, pelouses et gazons

Articles consacrés à la pollinisation par les insectes sur Sauvages du Poitou:
- Insectes pollinisateurs (1): la Sauvage et le coléoptère
- Insectes pollinisateurs (2): la Sauvage et le diptère
- Insectes pollinisateurs (3): la Sauvage et le papillon

Pour aller plus loin:

- Société Française d'Orchidophilie de Poitou-Charentes et Vendée



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Mot-clefs de ce billet...
botanique Orchidaceae Fabaceae Papilionaceae Lamiaceae

Commentaires


Michel Cuni   31/07/2018 21:26:18
Bonjour,

Désolé d' utiliser cette page de commentaire pour une question sur une fleur...

Pourriez vous me dire quel est cette fleur , une lamiacée blanche avec un coeur jaune, qui se trouve en bas a droite sur le groupe de 9 photos en tête de la page "vocabulaire de botanique (5) : fleurs irregulieres ?

Merci si vous pouvez me donner une réponse

michel
Norb   01/08/2018 10:28:07
Bonjour Michel, votre question est la bienvenue. Il s'agit d'Euphrasia stricta, une Orobanchacée (et non une Lamiacée). Si vous tentez d'identifier une Sauvage que vous avez rencontrée, attention, le genre Euphrasia est riche, et il convient d'observer l'ensemble de la plante pour cerner l’espèce, pas seulement la fleur.
Tristan Chatelier   28/05/2020 22:36:33
Bonjour, nous sommes mes cousins et moi sur whatapp et nous aimerions savoir quel est le nom de la fleur se situant au centre de la photo. ( photo 9 fleurs) , elle a poussée dans le jardin d'une cousine en Charente Maritime. Merci !!!
Norb   29/05/2020 19:30:40
Bonjour Tristan, il s'agit d'une Orobanche, une plante parasite dépourvue de feuilles vertes (et donc de chlorophylle) qui plante ses suçoirs sur les racines d'autres plantes ;)

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